8.5/10Dr Slump

/ Critique - écrit par juro, le 04/02/2005
Notre verdict : 8.5/10 - Le manga énorme (Fiche technique)

Tags : slump arale manga toriyama akira dragon norimaki

Diffusé à l'époque du Club Dorothée, les épisodes de Dr Slump étaient ultra censurés par AB Productions qui ne rendaient pas justice au manga original créé par Akira Toriyama, le créateur de Dragon Ball. Toute la candeur et les non-sens présentés plus tard dans les débuts de l'oeuvre la plus connue du mangaka sont réunis ici pour proposer un bouquet délirant, enchaînant les gags les plus insensés et les situations parodiques concernant le folklore japonais et mondial. Dans le petit univers complètement dingue du village Pingouin, l'animation est omniprésente et les personnages tous plus barges les uns que les autres. Et comme au pays des cinglés, les naïfs sont rois, les aventures de Aralé et Senbeï sont des histoires tout droit sortis d'un cerveau créatif comme jamais qui va nous amener dans des fous rires sans fin. Si Léonard est le génie occidental, Dr Slump est celui de l'orient.

Totalement « chtarbé »

Dr Slump
Dr Slump
Senbeï Norimaki est un créatif farfelu qui multiplie les inventions inutiles. Ce jour, il met au monde de ses grosses paluches le premier être robotisé porté par le Village Pingouin, un être capable de courir plus vite, sauter plus haut et résistant à tout. A l'apparence d'une adolescente, Senbeï a créé Aralé, un robot naïf, déluré et qui ne pense qu'à s'amuser. C'est le début de longues aventures et de soucis pour le créateur dans l'optique d'éduquer son robot et parvenir à trouver le bonheur, lui qui est considéré comme le plus grand pervers du village Pingouin. Sa tâche est rendue d'autant plus difficile qu'il n'est pas aidé par le petit monde déjanté qui l'entoure car entre les astres vivants dans les cieux, les super héros évoluant plutôt en tant que super ratés (une délicieuse parodie de Superman entre autres) ou encore des personnages parodiques d'origine diverse comme M. Spock, Yoda, Godzilla, Björn Borg ou Clint Eastwood. De l'humour, de l'humour, rien que de l'humour, les blagues s'enchaînent sans relâche avec un niveau d'absurdité qui frôle les 100%.

En effet, l'humour part dans tous les sens : tout et n'importe quoi à la fois sans jamais s'arrêter. Pourtant, ce n'était pas gagné d'apprécier Dr Slump surtout à cause de la présence de nombreuses « japoniaiseries » mais la traduction française parvient à rendre toute aussi performante l'atmosphère originale. On pourra regretter la présence d'un peu de vulgarité mais l'univers est tellement inventif, les effets parodiques inattendus et les personnages si drôles que s'imprégner du village Pingouin devient rapidement une nécessité absolue. Au cours des dix-huit volumes, la pression ne se relâche jamais et la proportion de gags à la page est hallucinante. Du coup, il reste peu de places pour un scénario concret, les événements ont rarement une influence d'une histoire à l'autre, seuls les personnages nouveaux apportent leur contribution au délire ambiant. En gros, le thème demeure l'apprentissage des codes de la vie quotidienne d'humain et les sauvetages pathétiques de l'humanité par Aralé, rythmé par les inventions de Senbeï.

Suppaman forever

Les personnages de Dr Slump sont sa force. L'imagination de Toriyama est sans limite, on ressent même une influence de Tex Avery dans la création des grimaces et chutes de gags parfois lourdement orchestrés. Les dix-huit volumes ne tombent jamais dans la redite, le renouveau est amené par les rencontres incongrues entre personnages spécialistes du non sens, même si certains «rolling gags» resurgissent fréquemment. Chaque arrivée mérite un tonnerre d'applaudissements lors de l'introduction rocambolesque provoqué par certains d'entre eux, le don de la mise en scène d'Akira Toriyama se sublime au prolongement des volumes et les légers manques trouvés dans les premiers sont largement effacés par la suite, au point qu'à partir du cinquième volume le lecteur se demande bien la façon dont le mangaka va pouvoir le surprendre. Mais il y arrive encore et toujours. A base de jeux de mots totalement niais, de grimaces ou encore de gags, Dr Slump est aussi bourré d'expressions et phrases d'anthologie, les fameux « N'cha » et « Hoyoyo » d'Aralé entre autres.

Le dessin propose la particularité de mélanger SD et trait plus réaliste. La priorité est évidemment à l'humour à outrance d'où des proportions totalement démesurées entre les têtes et les corps. Mais il existe toujours ce petit plus chez Toriyama qui fait de lui un très grand dessinateur. Autant le mangaka rend ses personnages ridicules pour nous faire rire, autant il est capable de superbes représentations lorsqu'il dessine le scientifique. Les cases sont toujours impeccables, c'est d'ailleurs sa marque de fabrique, le découpage reste assez classique et fourmille de détails. Ne cherchez plus, tous les éléments étaient déjà présents en 1980 pour faire de Dr Slump une série phare.

Au paroxysme de l'inculture

En ce qui concerne la série, l'animation est plutôt basique et fidèle au manga mais derrière la façade drôle, de gros problèmes apparaissent. Le générique et le doublage français sont kitchissimes, ne collant que moyennement à l'ambiance de la série mais le plus désagréable reste sans doute la censure omniprésente qui coupe abruptement les épisodes. Ceci est d'autant plus dérangeant que l'anime perd énormément en saveur, le scénario déjà maigrichon s'étiole rapidement, ce ne sont plus que des demi-épisodes durant lesquels deux ou trois gags surviennent. Pas de quoi fouetter un chat. L'anime de Dr Slump ne vaut pas vraiment son pesant de cacahouètes, mieux vaut se rabattre sur le manga. Par ailleurs, une autre série est parue au milieu des années 90 sans avoir été diffusé en France.

Toriyama exploite l'humour absurde à plein pot avec Dr Slump. Son univers vivant et incroyable a définitivement marqué les esprits et se trouve être à l'origine de quelques descendants de renoms comme Excel Saga ou One Piece. A tout jamais dans le panthéon des mangas, une des premieres bande dessinés japonaises parues en France est toujours aussi poilante. En un mot : culte !